Le roi Dankélé était un grand tyran, un roi qui gouvernait sans foi ni loi. Que tu aies raison, tu avais peur. Que tu n’aies pas raison, tu avais raison d’avoir peur devant lui.
À
cette époque, il y avait une seule rivière à laquelle tous les animaux
venaient boire, mais personne n’avait le droit de boire avant Dankélé. Et Dankélé ne se contentait pas seulement de se désaltérer, il se baignait dans la rivière, s'y roulait et y faisait tous ses besoins. C'est après que les autres pouvaient boire à leur tour l'eau déjà souillée.
C'était injuste, mais c'était comme ça. Il fallait le supporter. Mais la lionne mère, ce jour-là, ne put attendre l’arrivée du roi. Son lionceau, qui venait d’arriver au monde, allait mourir de soif. Elle lui donna un peu d’eau. Elle en but un tout petit peu, elle-même. Arriva le roi Dankélé. Il était accompagné des membres de sa cour, des griots et des griottes qui chantaient ses louanges :
« Ô ! Grand buffle !
Tu es plus grand que Soundjata le grand
Plus grand que Da Monzon le grand
Plus grand qu’Alexandre le grand ! »
Mais le roi Dankélé, quand il fut au bord de la rivière, vit qu’on avait osé boire avant lui, le roi. Il se tourna vers son peuple et, les menaçant de son regard, hurla sa colère. Et sa colère fit trembler tout le monde :
- Qui est-ce... ? Mais qui est-ce qui a donc osé boire avant moi le roi ? Si vous ne me désignez pas le coupable, vous l’êtes tous !
Les animaux, terrifiés, se regardèrent dans les yeux. Tout le monde avait vu la lionne donner à boire à son petit. Mais qui pouvait prendre la responsabilité de la dénoncer à cette brute de roi ? L’hyène le fit :
- Moi, je ne vais pas payer pour une faute que je n'ai pas commise. C'est la lionne qui a bu avant toi. Voilà, j'ai dit.
Et aussitôt, d'un bond, le roi Dankélé écrasa la lionne avec ses grosses pattes.
Mais le lionceau n’était pas mort. Il s’était sauvé à toutes pattes et était allé se cacher. Il attendit, attendit jusqu'à ce qu’il soit devenu grand.
Quand il fut devenu un grand lion dont le rugissement retentissait à travers toute la savane, il sortit et dit au buffle :
- Buffle, où est ma mère ?
Le buffle, intimidé par la force que dégageait le lion, bafouilla :
- Ta... Ta... Ta mère la lionne ?
Un conseiller lui souffla à l’oreille :
- Il s’agit de la lionne que tu as tuée il y a de cela quelques années parce qu’elle avait osé boire avant toi.
- Ah oui ! C’est vrai, dit le buffle en se tournant vers le lion. C’est la loi, ce n’est pas moi.
La loi, c’est la loi. Ta maman a osé boire avant moi, alors la loi lui a été appliquée. La loi, c’est la loi, la loi ce n’est pas moi...
- La loi qui ne s’applique qu’au plus faible est une loi injuste.
Et le lion se jeta sur le buffle, le terrassa et libéra les animaux.
C’est depuis ce jour qu’il est le roi des animaux. C’est aussi depuis ce jour qu’il s’efforce d’être juste et droit, car malgré sa force, il ne s'attaque jamais aux plus petits.
Conte du Mali